Dossier – Un Système national anticorruption voit le jour au Mexique !

Le comité de participation citoyenne qui chapeautera le Système national anticorruption est formé. C’est le premier acte de la mise en place d’un modèle qui sera répliqué dans chacun des 32 États du Mexique pour une entrée en vigueur simultanée prévue le 19 juillet prochain.

Une nouvelle ère dans la lutte anticorruption au Mexique ?

Le 30 janvier dernier, la sociologue Jacqueline Peschard a été nommée présidente du tout nouveau comité de participation citoyenne du Système national anticorruption (SNA) des États unis du Mexique. Elle est entourée de 4 autres experts de l’accès à l’information publique et des droits de l’Homme, comme elle non issus de partis politiques quoique choisis par le Sénat du Mexique parmi une soixantaine de candidats, dont 15 présélectionnés interrogés en direct sur Internet. Ce comité aura la lourde tâche de coordonner les efforts du SNA pour prévenir, surveiller et sanctionner tous les actes de corruption commis par des fonctionnaires, des entreprises et des particuliers.

C’est en quelque sorte l’acte de naissance du SNA, puisque ce corps administratif en gestation n’était jusqu’alors guère davantage qu’un vœu pieux, c’est-à-dire un paquet de 7 lois promulguées par le Président mexicain Enrique Peña Nieto en juillet 2016, dont une “loi générale des responsabilités administratives des fonctionnaires”, qui les oblige à déclarer leur patrimoine et leurs impôts.

La corruption, 10 % du PIB

Selon Maria Marvan, de l’association Transparence mexicaine, “il faut traiter le phénomène de la corruption tel qu’il est, comme un système de réseaux finement tissés entre fonctionnaires et hommes d’affaires. Pour le neutraliser, il faut donc le prévenir, le détecter et le punir”, dit-elle. “Avec ce nouveau système, la marge des corrupteurs et des corrompus sera réduite. Dorénavant, même le maire qui reçoit un pot-de-vin pour favoriser une entreprise de collecte d’ordures pourra aller en prison [dixit]. Oui, admet-elle, la corruption au Mexique est une façon d’être. Elle coûte au contribuable environ 10 % de notre PIB national”, assure-t-elle… soit quelque 200 milliards d’euros par an.

Un chiffre que Dante Preisser, conseiller en chef au secrétariat d’État à la Fonction publique, ne s’aventure pas à confirmer au vu de la complexité du sujet. “Le Système national anticorruption ne fonctionne pas encore, reconnaît-il. L’étape suivante de sa mise en marche sera la nomination par le Sénat d’un procureur fédéral anticorruption, avant le 30 avril prochain.” Le SNA doit entrer en vigueur intégralement dès le 19 juillet prochain, aussi bien niveau fédéral que dans chacun des 32 États unis du Mexique.

“Ce système instaure un changement de paradigme radical dans la lutte contre la corruption, ajoute Dante Preisser, car elle sera menée par un comité citoyen et s’exercera localement dans tous les États de notre pays. Après avoir étudié différents modèles mis en place à l’étranger, nous avons abandonné l’idée d’une commission parlementaire de lutte contre la corruption pour privilégier celle d’une structure horizontale chapeautée par un groupe de citoyens éclairés. Ce modèle est innovant et unique”, dit-il avec fierté.

Création d’un poste de procureur spécialisé

Ainsi, le contrôle administratif externe de la corruption sera exercé par la Cour supérieure de la fédération – l’équivalent de la Cour des comptes française –, dont les pouvoirs ont été accrus. Le contrôle interne sera appliqué par le secrétariat d’État à la Fonction publique et la poursuite des délits de corruption, jusqu’à présent sous la seule responsabilité du procureur général de la République, sera renforcée par la création d’un poste de procureur spécialisé dans les affaires de corruption et autonome, qui aura ses propres collaborateurs.

Cette structure créée au niveau fédéral sera répliquée dans les 32 États du Mexique, qui auront désormais chacun leurs propres procureur anticorruption, secrétariat de la fonction publique, institut de la transparence et comité de participation citoyenne. “Cette déclination au niveau des États permettra une homologation des processus”, explique Dante Preisser. Par ailleurs, “les requêtes du procureur anticorruption porteront sur le budget en cours d’exécution, ce qui dissuadera davantage les cas de corruption”, affirme-t-il.

Le système anticorruption a été critiqué dès sa promulgation par nombre d’ONG mexicaines à cause de l’immunité dont jouiront encore les élus parlementaires et membres des pouvoirs exécutifs fédéral et locaux. “Ce nouveau système anticorruption prévoit des mécanismes pour lever l’immunité des élus, mais il existe aussi un risque qu’il soit fait un usage politique de cet arsenal anticorruption comme cela fut le cas récemment au Brésil avec la destitution de Dilma Rousseff”, analyse Maria Marvan, de l’association Transparence mexicaine.

Source – http://www.acteurspublics.com

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