Migrants : le Mexique fait le “gendarme” des États-Unis !

Après l’élection de Joe Biden, des dizaines de milliers de candidats à l’émigration venus d’Amérique centrale ont espéré rentrer plus facilement aux États-Unis. Mais en fait, rien n’a changé, pointe El País México. Le pays renforce sa frontière sud de crainte d’une crise migratoire.

Au Mexique, une nouvelle crise migratoire guette. Les espoirs que nourrissent des milliers de personnes d’être accueillies aux États-Unis par le nouveau gouvernement du démocrate Joe Biden accentuent la pression à la frontière entre les deux pays.

Le gouvernement mexicain, qui pendant la présidence Trump avait fait de son pays un mur infranchissable pour tous ceux qui fuyaient la misère et la violence du “triangle nord de l’Amérique centrale” – Guatemala, Honduras, El Salvador, les plus proches du Mexique au sud –, se prépare à un nouveau défi.

Même si la frontière reste fermée en raison de l’épidémie de Covid-19, ces trois dernières semaines ont été marquées par une explosion des arrivées, en particulier de milliers d’enfants non accompagnés, mais aussi de Mexicains souhaitant quitter leur pays.

Les autorités ont réagi par l’intensification des contrôles, des arrestations et des expulsions vers le “triangle nord”.

La grave crise migratoire qu’a connue le Mexique en 2019 avait bouleversé l’ordre du jour de la première année de présidence d’Andrés Manuel López Obrador [investi en décembre 2018].

25 000 demandes relancées

La situation s’est détendue en 2020, sous l’effet de la pandémie. Les migrants n’ont pas cessé d’affluer, mais leur nombre a diminué. Selon les chiffres de la Commission mexicaine d’aide aux réfugiés, le Covid-19 a fait chuter les demandes d’asile de 42 % en un an.

L’arrivée de Biden au pouvoir et le retour à une rhétorique plus bienveillante envers l’immigration alimentent aujourd’hui un regain d’espoir : des milliers de personnes originaires d’Amérique centrale se pressent de nouveau à la frontière, ou se préparent à le faire.

Le gouvernement Biden a relancé en février le traitement de 25 000 demandes d’asile afin de mettre fin aux pratiques les plus cruelles de son prédécesseur. Quelques demandeurs sont depuis lors entrés aux États-Unis, mais en règle générale, les statistiques témoignent d’une frontière toujours étanche.

En février, quelque 100 000 personnes ont été arrêtées alors qu’elles tentaient de passer la frontière – c’est 28 % de plus qu’en janvier. Sur le mois de mars, la moyenne des arrestations quotidiennes tourne autour de 4 000, ce qui augure d’un total encore plus élevé sur le mois entier.

Dans les deux pays, les autorités rappellent que les portes restent fermées à tous, sauf à ceux résidant aux États-Unis ou aux citoyens américains. “Nous expulsons la majorité des arrivants, adultes isolés et familles”, a mis en garde le ministre de la Sécurité intérieure des États-Unis, Alejandro Mayorkas.

Consignes aux ambassades mexicaines

La crainte de voir apparaître une nouvelle caravane – ces marches massives de migrants venus d’Amérique centrale vers les États-Unis en 2018-2019 – hante le gouvernement de Mexico, qui a demandé ces derniers jours à ses ambassades en Amérique centrale de diffuser des communiqués précisant qu’il “n’autorisera pas l’entrée irrégulière” de personnes par sa frontière sud.

La sonnette d’alarme retentit dans tous les grands postes-frontières du pays, qui constatent tous les jours l’augmentation du nombre d’arrivants. Des militants associatifs avaient convoqué une réunion à distance pour préparer une réponse à la nouvelle crise qui guette.

Le message envoyé aux migrants est de ne pas bouger”, précise Juan Antonio Sierra Vargas, responsable de la Casa del Migrante [“Maison du migrant”] à Matamoros, dans l’État du Tamaulipas, à la frontière du Texas. Les rares autorisations de séjour accordées ont alimenté la rumeur de portes grandes ouvertes.

Les gens ne font pas attention, malheureusement. Ils croient que parce que le pont frontalier a ouvert, ils peuvent passer plus facilement, mais c’est faux.”

La vague migratoire que connaît aujourd’hui le Mexique présente deux caractéristiques, explique Alberto Hernández, président de l’université Colegio de la Frontera, spécialiste des migrations. Premier point, l’afflux de Centraméricains qui voient à tort en Biden la promesse de “réaliser leur rêve” de s’installer aux États-Unis.

Deuxième point, et c’est une nouveauté, la présence de Mexicains ayant décidé de quitter leur pays :

L’émigration mexicaine avait fortement diminué ces dernières décennies, et elle repart.”

“Position de digue”

Cela s’explique notamment par la relance économique postpandémie, qui semble plus prometteuse aux États-Unis qu’en Amérique latine.

En réaction à ces afflux, les autorités multiplient les contrôles à la frontière, racontent les militants de l’aide aux migrants. Rien qu’entre le 25 janvier et le 16 février, l’Instituto Nacional de Migración (INM) a arrêté quelque 1 200 personnes qui voyageaient en train dans le sud et le centre du Mexique. Environ 800 autres voyageant en bus l’ont été dans les mêmes régions.

Selon Alberto Hernández :

Le Mexique continue d’expulser plus de migrants que les États-Unis. Notre pays va garder cette année sa position de digue, son rôle de contention ne changera pas.”

Source – https://www.courrierinternational.com/

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