Piñata, ponche et bonne humeur : tout savoir sur la posada navideña ! (Video)

Piñata, ponche et bonne humeur. Si vous êtes au Mexique au moment de Noël, vous n’y couperez pas. Ces fêtes ont une origine religieuse bien particulière. Explications et conseils. A la fin de cet article, vous saurez préparer le « ponche » !

Le Mexique est en pleine période des fêtes de fin d’année que l’on appelle ironiquement le « Guadalupe–Reyes », entre la fête de la Vierge Marie (12 décembre, voir notre reportage) et l’épiphanie (6 janvier). Certains prétendent qu’il est possible d’enchaîner les fêtes tous les soirs sauf cette année 2020 car pour cause COVID19 la plupart des posadas pour ne pas dire toutes ont été annulées notamment dans les entreprises.

En effet ce ne sont pas les occasions qui manquent. Il y a bien sûr Noël, le jour de l’an, l’épiphanie (fiesta de los reyes) et nous avons déjà parlé de la fête de la Vierge. Mais il y a surtout les fameuses posadas : ces douces soirées de décembres où les maisons exhalent des parfums de goyave et d’atole.

Les posadas, « auberges » en espagnol sont des fêtes du catholicisme espagnol qui commémorent –pendant les 9 jours précédant Noël- les pérégrinations de Joseph et Marie à la recherche d’une… auberge sur leur chemin vers Béthléem. La tradition a été instituée par les religieux espagnols à l’époque de la Conquête afin de détourner les Mexicas de la fête de naissance du dieu de la guerre Huitzilpochtli, qui se célébrait précisément du 17 au 26 décembre !

Depuis, la coutume est restée de reproduire la scène de l’arrivée de Joseph et Marie à la porte d’une auberge. Souvent, chaque famille se rend chez ses voisins, frappe à la porte et demandent l’hospitalité. Derrière la porte, les voisins refusent d’abord, puis acceptent finalement les pauvres voyageurs. Les portes s’ouvrent et la fête commence.

On sert de l’atole, boisson sucrée et chaude à base de farine de maïs, des tamales et le traditionnel ponche : une boisson à base de fruits (goyave, pomme), d’épices sans oublier le rhum pour affronter l’hiver ! (Voir recette complète plus bas).

Puis, les enfants tapent dans la piñata, une grosse figurine à 7 pics en papier mâché, qui représentent les sept péchés capitaux que l’on abat. Tandis que les bonbons et les jouets contenus dans cette piñata symbolisent l’abondance. Bon, certes, de nos jours, ces figurines représentent plus souvent Spider Man ou La Petite sirène que les 7 péchés capitaux…

Voilà, maintenant, que vous savez comment se déroule une posada, il ne vous reste plus qu’à inviter vos voisins !

Voici la recette du ponche pour 12 verres :

-Ingrédients : 4 litres d’eau, 6 goyaves coupées en 4, 2 pommes jaunes coupées en 4, 2 morceaux de canne à sucre épluchés et en morceaux, 5 cosses de tamarin et la pulpe, 20 tejocotes (200 gr), 2 bâtons de cannelle, 1 tasse de pruneaux, ½ tasse de raisins secs, 200 gr de « piloncillo » (sucre de canne en pain), ¾ de tasse de rhum.

-Préparation (1h):

Couper les goyaves en quartiers, ainsi que les pommes, et les couper en deux. Enlever toutes les graines. Éplucher la canne à sucre et la couper en morceaux fins de 10 cm environ.

Peler les cosses de tamarin. Enlever les graines pour ne laisser que la pulpe. Faire bouillir de l’eau. Ajouter les tejocotes et la cannelle. Laisser bouillir 5 minutes. Ajouter les goyaves, les pommes, la canne à sucre, les pruneaux et les raisins secs. Laisser bouillir à feu doux pendant 30 minutes au moins. Puis ajouter le rhum et servir chaud.

Briser des piñatas à Noël pour exorciser le mal, une ancienne tradition mexicaine

Voir son œuvre détruite à coup de bâton n’est jamais agréable mais Celia Claudio s’y prépare à chaque fois qu’elle fabrique minutieusement à la main une « piñata » pour les fêtes de fin d’année au Mexique.

« Ca fait mal, mais en même temps, ça fait plaisir de les voir emporter un objet que j’ai fabriqué », raconte cette femme de 35 ans, lors de la Feria de Acolman de Nezahualcoyotl, dans l’Etat de Mexico (centre), près de la capitale.

Avec ses formes infinies et ses couleurs vives, les piñatas forment un élément central des fêtes de Noël au Mexique.

Confectionnée à partir d’un pot d’argile enrobé de papier multicolore, la piñata traditionnelle prend la forme d’une étoile, dotées de sept pointes. Elle est remplie de fruits, de bonbons ou encore de petits jouets qui seront libérés une fois la piñata brisée, déclenchant la frénésie de l’assistance pour s’en accaparer.

La tradition remonte au 16ème siècle et la destruction de la piñata symbolise la destruction « du mal ».

Lors des fêtes religieuses mexicaines et en Amérique centrale  – qui s’étalent durant les neuf jours précédant Noël- , les fidèles se bandent les yeux et, ainsi désorientés, doivent parvenir à briser l’objet suspendu non loin d’eux.

– Un « jouet » évangélisateur –

Si la piñata est aujourd’hui l’occasion d’un amusement populaire dans les familles mexicaines, il s’agit d’une tradition qui mélange les rites indigènes et ceux espagnols introduits par l’ordre de Saint-Augustin. Cet ordre catholique, dont le couvent est toujours visible à Acolman, s’est établi au Mexique pour évangéliser les indigènes.

A cette époque, l’ethnie Acolhua vivait à Acolman, et appréciait particulièrement la musique, les chants, les danses et les représentations théâtrales. Les Espagnols ont décidé d’utiliser la piñata comme moyen pour les évangéliser, explique Araceli Juarez, une spécialiste de cette tradition.

« La piñata était utilisée comme une instrument de conversion, afin d’enseigner ce qu’est le mal », explique-t-elle. Pour les religieux, le mal attirait l’attention, comme cet objet festif, multicolore, en forme d’étoile, dont les sept pointes représentaient les sept péchés capitaux.

Les religieux s’en servaient pour expliquer que si un individu détruisait les péchés avec une foi aveugle, alors il serait récompensé pour ses efforts, symbolisés par les friandises répandues sur le sol devant lui, assure l’experte.

Cette tradition « possède de nombreux éléments de syncrétisme » entre la doctrine catholique et la cosmogonie indigène. Par exemple, beaucoup de communautés indigènes brisaient – avant l’invasion espagnole – leurs pots en argile chaque 52 ans pour marquer la fin d’un cycle et « rompre avec l’ancien », explique Juarez.

– Piñatas Donald Trump –

Chaque année, environ 100.000 personnes se rendent à la Feria de la Piñata d’Acolman, une austère localité située dans un paysage de pins, où environ 250 artisans travaillent à fabriquer jusqu’à 40.000 piñatas par an, qui sont vendues ensuite dans tout le pays.

Pour Celia, « chaque piñata est spéciale » et à chaque fois qu’elle en vend une, elle a l’impression qu’on lui retire « un bébé ». Durant cinq jours, la place principale de la ville se transforme en marché où toutes sortes de piñatas sont vendues aux visiteurs, des miniatures jusqu’aux monumentales de plus de quatre mètres de large.

L’activité fait vivre une grande partie de cette communauté, même si les piñatas sont également produites dans de nombreuses villes du Mexique. « Je suis très excitée de venir chercher la piñata pour ma famille. Nous allons la briser durant le repas de Noël », commente Joaquina Ramos, une professeure d’histoire en secondaire.

Pour Celia, maintenir la tradition est important, mais parfois difficile. La clientèle « demande des piñatas à l’effigie de personnages de dessins animés » comme Superman ou les Minions, explique-t-elle en fabriquant une piñata de carton.

Les piñatas à l’effigie du président américain Donald Trump ont même fait leur apparition.  En 2016, des sénateurs du PRD (Parti de la Révolution Démocratique – gauche) s’étaient ainsi amusés à rouer de coups une piñata à son effigie lors d’une fête de Noël au Sénat.

« Dans ce monde globalisé, il n’y a plus d’espace pour ce qui est vraiment mexicain », regrette-t-elle.

Raphaël Morán – (www.legrandjournal.com.mx)

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