Les autorités mexicaines ont dévoilé ce matin le plan officiel pour la reprise des activités dans le pays mais le déconfinement fait débat alors que la gravité de la crise continue de préoccuper les spécialistes.
En présence du ministre mexicain de la Santé, Jorge Alcocer, le Président Andrés Manuel Lopez Obrador a rappelé que le pays est depuis une cinquantaine de jours sous la règle de la distanciation sociale – Sana Distancia – et a salué les efforts de la population à cet égard.
Le plan du gouvernement consiste en l’application de trois étapes successives :
1- à partir du 18 mai, 269 municipalités dans 15 Etats où l’on n’enregistre pas de cas du Covid 19 vont retrouver un rythme normal
2- du 18 au 31 mai, la réouverture sera préparée. Les secteurs de la construction, des mines et la fabrication d’équipement industriels sont considérés comme essentiels.
3- à partir du 1er juin, les activités sociales, éducatives et économiques reprendront un rythme normal progressivement.
Rajoutons que pour la ville de Mexico, le déconfinement sera plus réel à partir du 15 juin, date à laquelle les restaurants, les banques, les grands magasins, les églises, cinémas et théatres pourront ouvrir sous certaines conditions et avec l’option que les autorités reprennent de nouvelles mesures en cas de rechute importante ! La prudence semble de rigueur !
Le gouvernement a dévoilé une grille d’évaluation des activités
Ces dernières sont évaluées selon les niveaux suivants : vert, jaune, orange, rouge. Les activités sont également classées selon les 5 critères suivants : mesures de santé publique et de travail, activités essentielles ou non, espace public ouvert ou fermé, personnes vulnérables, activités éducatives.
TIP: Pour savoir si votre municipalité à pris des mesures de déconfinement et pour quand, cliquez sur le lien suivant: (attention le site est un peu lent)
Un déconfinement qui fait débat !
Le président mexicain Andrés Manuel López Obrador, qui avait cherché dans un premier temps à minimiser le risque posé par la pandémie de COVID-19, ouvre la porte au déconfinement alors que la gravité de la crise au Mexique continue de faire débat.
Le bilan officiel de 38 000 cas d’infection et de 3900 morts au 12 mai, pour une population de 130 millions d’habitants, est jugé peu crédible par nombre d’analystes et est contesté même par des élus proches du président.
Le New York Times a notamment révélé la semaine dernière que la ville de Mexico, dirigée par une alliée du président mexicain, considère que le nombre de décès liés à la pandémie de COVID-19 sur son territoire est trois fois supérieur à celui qui est officiellement reconnu par le gouvernement.
La presse a rapporté que des personnes malades cherchant à être soignées étaient régulièrement refoulées par des hôpitaux de la capitale au maximum de leur capacité.
Le gouvernement a déjà admis que nombre de victimes de la pandémie n’étaient pas officiellement reconnues comme telles, faute d’avoir été testées à temps avant de mourir, alimentant les interrogations sur la gravité de la situation.
Le faible nombre de tests pratiqué par le pays suscite la controverse et pousse nombre de Mexicains à se demander si le gouvernement « ne cherche pas volontairement » à maquiller la réalité, relève Vanda Felbab-Brown, analyste rattachée à la Brookings Institution, à Washington.
Catalina Torres, doctorante en sciences de la santé qui étudie les pratiques des pays de la région dans ce domaine, note que le Mexique teste, proportionnellement à sa population, trois fois moins que la Colombie et 14 fois moins que le Chili. « Si tu ne testes jamais, tu ne trouves jamais », relève la chercheuse, qui est rattachée à l’Université du Danemark du Sud.
Pressions américaines
Jorge Pantaleon, chercheur rattaché au Centre d’études et de recherches internationales de l’Université de Montréal, estime que le président mexicain reconnaît les risques posés par le virus, mais voulait « éviter de susciter la panique » en suggérant d’emblée qu’il faudrait tout fermer.
Dans une économie où près de la moitié de la population vit dans la pauvreté et gagne au jour le jour ce qu’il lui faut pour manger, l’idée d’un confinement total était difficilement applicable, relève le chercheur.
Quel que soit l’impact du taux de dépistage sur les chiffres officiels, il apparaît clairement que le Mexique est bien moins touché par le coronavirus sur le plan sanitaire que son voisin américain, relève M. Pantaleon.
L’administration du président Donald Trump, dit-il, fait fortement pression aujourd’hui sur le gouvernement mexicain pour relancer des secteurs d’activité essentiels, comme l’industrie automobile, qui lient les économies des deux pays.
Le président Obrador, qui s’est fait élire en promettant de lutter contre les inégalités sociales, est sensible à ces demandes alors que l’économie mexicaine est mise à mal par l’interruption de la production industrielle, la chute du prix du pétrole et l’effondrement du tourisme.
Sa volonté de rouvrir l’économie apparaît prévisible, mais se heurte encore une fois à la résistance d’élus locaux passablement inquiets de l’évolution de la pandémie, souligne Mme Felbab-Brown. « Il faut être extrêmement optimiste pour penser que la situation est sous contrôle », relève l’analyste.
Sources – La Prensa Francesa et La Presse.ca