Le candidat de droite a largement battu Sandra Torres pour succéder à Jimmy Morales à la tête d’un pays marqué par la corruption, la misère et la violence. Alejandro Giammattei promet de combattre les trafiquants de drogue à coup de « testostérone » et de rétablir la peine de mort.
Le candidat de droite Alejandro Giammattei a été élu dimanche 11 août à la présidence du Guatemala, a annnoncé le tribunal électoral. Avec 95% des bulletins dépouillés, le Dr. Giammattei était crédité de 58,7% des suffrages, selon le décompte communiqué par le Tribunal suprême électoral (TSE). Le parti de son adversaire sociale-démocrate Sandra Torres a reconnu sa défaite.
Alejandro Giammattei a promis de combattre les criminels et les trafiquants de drogue à coup de « testostérone », et de rétablir la peine de mort. Comme son adversaire sociale-démocrate, il s’est prononcé contre le mariage homosexuel et la légalisation de l’avortement. Se déplaçant à l’aide de béquilles en raison d’une maladie vieille de 40 ans, le médecin conservateur en est à sa quatrième candidature depuis 2007, à chaque fois pour des partis différents.
Colères intempestives et incontrôlables
Elu sous les couleurs du parti de droite Vamos (Allons-y), Alejandro Giammattei est redouté pour ses colères intempestives et incontrôlables. Ancien directeur de l’administration pénitentiaire, il a lui-même connu la prison pendant 10 mois en 2010. Accusé dans une affaire d’exécution extrajudiciaire de huit détenus en 2006, il a été libéré faute de preuves mais est resté, dit-il, profondément marqué par cette expérience d’incarcération.
Le scrutin a été marqué par une forte absention, de plus de 55%, selon les résultats préliminaires. Plus de huit millions d’électeurs guatémaltèques étaient appelés à voter dimanche pour élire le successeur du président sortant Jimmy Morales, dont l’unique mandat de quatre ans a été entaché par de nombreux scandales. La prise de fonction du nouveau président est programmée pour le 14 janvier 2020.
Les électeurs rencontrés par l’AFP avaient beau être désabusés, ils ont l’espoir que leur nouveau président aura à coeur de venir à bout des trois plaies de leur pays : la corruption, la violence criminelle et la misère. « Nous voulons un président pour de vrai… Qu’il tienne ses promesses », a déclaré à l’AFP Marta Lidia Subuyuj, une paysanne de 43 ans.
Les deux finalistes de la compétition présidentielle étaient des vieux routiers de la politique du Guatemala : Sandra Torres en était à sa troisième tentative et Alejandro Giammattei briguait pour la quatrième fois un mandat présidentiel. L’ancienne juge anti-corruption Thelma Aldana, qui aurait pu répondre aux aspirations au changement, a été écartée de la compétition. Accusée d’avoir recruté un stagiaire pour un emploi fictif, sous le coup d’un mandat d’arrêt international, elle a pris le chemin de l’exil.
Les Guatémaltèques ont été échaudés par le président sortant Jimmy Morales : ils pensaient renouveler la classe politique en élisant en 2015 cet humoriste de la télévision sans aucune expérience du pouvoir… Las, le bateleur finit son unique mandat de quatre ans sous le coup d’une enquête pour financement illégal de campagne électorale.
Pacte migratoire imposé par Trump
La corruption qui gangrène le Guatemala et le pacte migratoire humiliant imposé par Donald Trump ont dominé la campagne électorale en vue du second tour. Les deux candidats ont assuré qu’ils lutteront contre la corruption. Cette volonté affirmée se heurte cependant au scepticisme de leurs opposants et des analystes, d’autant que Mme Torres et M. Giammattei ont annoncé vouloir se passer de l’aide de la CICIG, la mission anticorruption de l’ONU, déclarée indésirable pour avoir mis en accusation le président sortant.
A la préoccupation lancinante du combat contre la corruption, est récemment venue s’ajouter l’humiliation d’un pacte migratoire arraché par Donald Trump. Malgré le tollé soulevé au Guatemala par cet accord aux termes flous et conclu dans l’opacité, les deux candidats se sont montrés d’une grande prudence dans leurs commentaires et quant à leurs intentions. Selon la Maison-Blanche, cet Etat est dorénavant considéré comme un « pays tiers sûr » auprès duquel les demandeurs d’asile devront effectuer leurs premières démarches.
Pour nombre de responsables d’ONG, le Guatemala ne peut recevoir les migrants en route pour les Etats-Unis alors qu’il n’arrive même pas à subvenir aux besoins de sa propre population. En effet, 60% des 17,7 millions d’habitants vivent sous le seuil de pauvreté. Ce pays du « triangle nord » de l’Amérique centrale fournit lui-même, avec le Honduras et le Salvador voisins, un des plus gros contingents de candidats au « rêve américain » et qui se jettent sur les routes pour fuir la misère et la violence des gangs.
Source – Agences