En dialecte aztèque, « acapulco » signifie « région des roseaux denses », et un facétieux hasard a voulu que le fauteuil auquel la célèbre station balnéaire donna son nom soit fait de jonc plastique. Retour sur les origines incertaines d’une des assises les plus singulières du XXe siècle.
Pour le commun des mortels, Acapulco évoque un Mexique de carte postale, particulièrement prisé par Liz Taylor, Elvis Presley, John Wayne et le tout-Hollywood. Un paradis en Technicolor, où l’océan rencontre les falaises de la Sierra Madre del Sur, desquelles s’élancent les clavadistas, plongeurs trompe-la-mort qui défient la gravité durant trois longues secondes, avant d’être engloutis par les flots trente-cinq mètres plus bas. Pour les amateurs de design et de déco, ce nom s’avère également indissociable d’une petite merveille de métal et de PVC, dont la genèse remonte vraisemblablement aux années 1950. D’aucuns avancent même la date de 1953, sans pouvoir étayer leurs dires. Quoi qu’il en soit, la période correspond à l’âge d’or de la ville côtière du Guerrero.
Volatile, la légende prétend qu’un touriste français, ou peut-être une touriste, s’était mis en quête d’un siège susceptible d’accueillir ses bains de soleil et, insatisfait de ce qu’on lui proposait sur le marché, il s’adressa à un artisan afin de mettre au point l’assise ultime. On ne sait exactement si le concept de l’Acapulco doit être porté au crédit du commanditaire, lequel aurait donné des instructions très précises à exécuter, ou à celui de l’homme de métier, qui répondit si brillamment aux besoins de son client.
Peu importe, le fauteuil mythique était né. Son génie réside dans l’influence de spécificités locales, avec, tout d’abord, l’idée d’un dossier ventilé, ouvert à la brise de mer qu’offre l’Abra de San Nicolas – un passage creusé dans la roche par les Espagnols à l’aube du xixe siècle, pour soulager la rade de son atmosphère suffocante. Ensuite, pour permettre cette ventilation tout en demeurant confortable, l’anonyme artisan s’inspira des techniques de tissage du hamac maya, réputé pour être le plus confortable au monde. Léger et résistant, facile à produire et à entretenir, recyclable et peu onéreux, l’Acapulco multiplie les avantages, et son look intemporel, sa forme ovoïde et ses rayons colorés confèrent une touche exotique à tous types de jardins, terrasses et intérieurs.
Très populaire à l’époque – on le retrouve dans les clubs huppés comme chez les particuliers -, il vit sa notoriété progressivement décliner, à l’instar de la cité qui l’avait vu naître : le glamour hollywoodien y fit place aux hordes de Spring Breakers avides de sea, sex and sun, avant que les cartels de narcotrafiquants achèvent d’en éloigner les touristes. Jamais vraiment disparue, et toujours fabriquée à même les trottoirs de Mexico City, dans les quartiers branchés de Roma ou Condesa, la célèbre » silla » connaît enfin un regain de notoriété en 2008, à la faveur de l’expo itinérante Cajas en Transito, dont l’objectif de promotion du design mexicain fut rempli au-delà des espérances. Car, soudain, l’Acapulco se rappelait au bon souvenir des éditeurs du monde entier, qui furent nombreux à revendiquer et bientôt exploiter l’héritage de cette icône née sous X.
Source – http://weekend.levif.be