Israel Vallarta est l’un des détenus qui, au Mexique, a passé le plus de temps en prison sans avoir été reconnu coupable du moindre crime : quinze ans sans jugement.
Un article d’Emmanuelle Steels du 19 décembre 2019
Mais ce n’est pas cette longévité carcérale qui lui vaut sa renommée : son cas a été médiatisé dès son arrestation, en décembre 2005, lors d’une fausse libération d’otages orchestrée par la police fédérale et retransmise en direct à la télévision. Dans le rôle des kidnappeurs : Israel Vallarta et Florence Cassez, une citoyenne française. Le couple avait été arrêté sans justification et forcé de participer, un jour plus tard, à un montage conçu pour les incriminer.
A l’époque, la police fédérale, accusée d’accointances avec le cartel de Sinaloa, entendait laver son image et détourner l’attention des médias. Les ficelles sont grossières, mais dans un pays où les enlèvements horrifient l’opinion publique, le show convainc. Et même si la tromperie est ensuite révélée, une majorité de Mexicains restent convaincus d’avoir bien vu, à la télévision, des kidnappeurs et leurs victimes.
En 2013, la Cour suprême mexicaine ordonnait la libération de Florence Cassez, jugeant toute l’enquête entachée par cette vaste fumisterie. Les médias mexicains débattent régulièrement de «l’affaire Cassez». Jamais de «l’affaire Vallarta».
En 2011, le documentaire Presunto Culpable, qui retrace le destin d’un jeune rappeur accusé d’assassinat, avait bouleversé les Mexicains. Mais davantage encore que cette fabrication de coupable, le cas de Vallarta agglomère tout ce que le système policier et judiciaire contient d’imposture purulente et d’illégalité systématique. Peu d’histoires sont aussi emblématiques de tous les abus commis au nom de cette justice dégradée.
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