Scientifique de renom, Claudia Sheinbaum va devenir mardi la première femme présidente du Mexique en tenant d’imposer son style après le mandat de son très populaire prédécesseur, son mentor Andres Manuel Lopez Obrador.
Scientifique de renom, Claudia Sheinbaum va devenir mardi la première femme présidente du Mexique en tenant d’imposer son style après le mandat de son très populaire prédécesseur, son mentor Andres Manuel Lopez Obrador.
« On voudrait que je prenne mes distances. Jamais ! Parce que c’est et ce sera un honneur d’être avec Obrador », prévient l’ex-maire de Mexico, à l’heure de prendre le relais du chef charismatique qui a installé la gauche au pouvoir en 2018.
« Leur moteur c’est la lutte pour une société plus juste, mais avec des nuances importantes », écrit l’essayiste Jorge Zepeda Patterson dans sa biographie « Presidenta ».
« Lopez Obrador vient du Tabasco (sud) rural » alors que « Sheinbaum vient d’un milieu universitaire, de classe moyenne, cosmopolite,essentiellement urbain ».
Elle incarne « une gauche plus moderne », ouverte au féminisme et à l’environnement.
Lopez Obrador, 70 ans, a consacré toute sa vie à la politique. Sheinbaum, 62 ans, est aussi une physicienne consacrée par ses dizaines de publications dans des revues spécialisées.
« Elle n’est pas populiste », souligne Pamela Starr, professeure de Sciences politiques à l’Université de Californie du sud. « Elle est plus pragmatique et moins portée sur l’idéologie que Lopez Obrador ».
« Fille de 68 »
Brillante élève, chercheuse, adjointe puis maire de Mexico, candidate, présidente élue, Sheinbaum renvoie l’image d’une femme sérieuse, réservée, un brin austère – « froide » disent ses adversaires.
Sans avoir le contact facile de Lopez Obrador, c’est avec sourire qu’elle se prête au jeu des selfies avec une centaine de personnes un soir du mois d’août à l’aéroport de Puerto Vallarta (ouest), a constaté un journaliste de l’AFP.
Claudia Sheinbaum Pardo est née en juin 1962 à Mexico au sein dans une famille juive, laïque et très à gauche.
Originaires de Bulgarie et de Lituanie, ses grands-parents sont arrivés au Mexique pour fuir la misère et l’antisémitisme, a-t-elle raconté dans une lettre au journal de gauche la Jornada en 2009, condamnant les « bombardements de l’Etat d’Israël sur Gaza ».
« Je suis fille de 1968 », répète-t-elle. Sa mère Annie Pardo, une biologiste réputée, a été expulsée de son poste à l’université pour avoir dénoncé la répression sanglante du mouvement étudiant le 2 octobre 1968 à Mexico (des centaines de morts).
Malgré son caractère réservée, Sheinbaum a été très engagée dans la lutte étudiante contre un projet de privatisation de l’Université nationale autonome du Mexique (UNAM) en 1986, se rappelle Guillermo Robles, son collègue en master.
Activiste, mère de famille à 26 ans, la jeune femme obtient un doctorat en ingénierie environnementale, après un séjour à l’université de Californie avec son premier mari, Carlos Imaz, et les deux enfants du couple.
« Ils étaient les typiques mexicains de gauche qui critiquaient les Etats-Unis », ironise l’ex-ministre mexicain des Affaires étrangères Jorge Castañeda, qui les a connus à l’époque.
En 2000, Sheinbaum est nommé adjointe à l’Environnement par Lopez Obrador élu maire de Mexico, avec à l’agenda plusieurs projets pour réduire la pollution (couloirs de bus, pistes cyclables).
Des tragédies dans la capitale
La « doctora » est retournée à la recherche après la première défaite d' »AMLO » à la présidentielle de 2006.
La Mexicaine fut membre d’un panel du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), prix Nobel de la paix en 2007.
Elle revient en politique en 2015, à la tête d’un district de Mexico endeuillé par l’effondrement d’un collège lors du séisme de septembre 2017 (26 morts dont 19 enfants).
Attaquée, Mme Sheinbaum a présenté des « excuses » aux familles en février 2023, en dénonçant « la négligence et la corruption » des autorités et des responsables de la construction.
L’éternelle bonne élève a été élue première femme maire de la capitale en 2018, quand Lopez Obrador parvint à la présidence de la République à sa troisième tentative.
Pendant la pandémie, Sheinbaum agit en scientifique autant qu’en politique. « Elle a porté des masques, même en présence de Lopez Obrador » qui se moquait de cette mesure préventive, rappelle Zepeda Patterson.
Mexico a néanmoins enregistré un nombre important de victimes.
A la tête de la capitale, Sheinbaum a surmonté une autre tragédie : l’effondrement d’un pont aérien de la ligne 12 au passage d’une rame de métro en mai 2021 (26 morts).
La maire de la capitale a négocié des indemnisations avec l’entreprise à l’origine de l’ouvrage, propriété du milliardaire Carlos Slim. « Gouverner c’est prendre des décisions (…) et assumer les pressions qu’elles peuvent générer », argumente la présidente dans un documentaire.
Divorcée de son premier mari, la présidente s’est remariée en 2023 avec Jesús Maria Tarriba, un ex-amour de jeunesse.
Source – Agences