Le Clézio : Le plus mexicain des auteurs français !

Voila qui devrait donner des ailes au plus mexicain des écrivains français! JMG Le Clézio s’est vu remettre un “Aigle Aztèque”, la plus haute distinction que réserve le Mexique à un étranger…

C’est pour son apport en tant que “spécialiste des civilisations antiques mexicaines” que l’auteur du “Rêve Mexicain” a reçu des mains du président Calderón son “Águila Azteca”.

Décrivant Le Clézio comme un “prix Nobel français très mexicanisé et, j’ose le dire, très michoacanisé” le président Calderón a fait allusion aux longs séjours effectués par l’écrivain au Mexique et en particulier dans le Michoacán (état dont est originaire le président), où il puisa l’inspiration pour son ouvrage “Relations du Michoacán” publié en 1984.

Lors de son discours, Le Clézio a évoqué entre autres Octavio Paz et surtout Juana Inés de la Cruz comme source d’inspiration de son œuvre. De cette dernière, il a affirmé qu’elle avait été parmi les premières à promouvoir la nécessité d’un métissage culturel.

Au cours des années la distinction a été décernée à un éventail bigarré de personnalités parmi lesquelles on retrouve Nelson Mandela, Lula, Bill Gates, Gabriel García Marquez, Fidel Castro ou encore Placido Domingo…

A présent doté de tels attributs aquilins, la cote de l’écrivain devrait littéralement s’envoler!

Nicolas Quirion – (legrandjournal.com.mx)

Le Clézio : Le plus mexicain des auteurs français

Article du 1er décembre 2010

A 70 ans, Jean-Marie Gustave Le Clézio a choisi Guadalajara pour sa deuxième apparition publique dans un Salon du Livre (seul Buenos Aires avait eu le droit à cet honneur). Pas un hasard. Amoureux du Mexique où il a vécu une dizaine d’années et dont la culture irrigue son œuvre, le Prix Nobel 2008 a séduit la FIL par son humanisme. Retour sur la façade mexicaine de l’auteur français.

Exposer son brio sur les plateaux télé et prendre part à tous les débats sous prétexte que son œuvre fait référence n’est pas le genre de JMG Le Clézio. Face à la presse samedi, et en compagnie de l’historien, Jean Meyer, dimanche, pour sa conférence magistrale sur la littérature interculturelle, le Prix Nobel 2008 de littérature se présente comme un «fils de paysan», méfiant envers Paris et «ses intellectuels abstraits».

L’écrivain français foule le sol mexicain pour la première fois en 1967. Il donne alors des cours à l’Institut français d’Amérique latine (IFAL) de Mexico. «Je ne connaissais pas un mot d’espagnol, j’ai dû l’apprendre dans la rue, pour cela mon espagnol est un peu callejero, amorce t-il. Je me suis aussi plongé dans les livres, car j’étais chargé de faire des fiches pour la bibliothèque, mais au lieu de cela je me cachais pour lire le maximum d’ouvrages sur le pays.

Ensuite, je me suis mis à voyager pour vérifier ce que j’avais lu sur la culture mexicaine.» Son premier périple l’envoie dans la Sierra Madre du Nayarit à la rencontre des Huicholes. Le livre des fuites (1969, Gallimard) témoignera de cette découverte d’un nouveau monde dans sa géographie personnelle.

JMG Le Clézio ne se lasse pas de le répéter, le Mexique le fascine par le caractère vivant de son Histoire : «C’est une dimension qui n’existe pas en Europe, ici l’Histoire peut traverser chaque jour, elle a à voir avec la croyance, avec l’être profond. Il s’agit pour moi d’un élément fondamental de la culture mexicaine.»

A l’hégémonie culturelle de la société de consommation occidentale il oppose le bouclier des savoirs des civilisations pré-colombiennes. «Dans le choc culturel peut-être le plus brutal de l’histoire, entre colons espagnols et Empire aztèque, nous avons beaucoup perdu.»

Dans Le rêve mexicain ou la pensée interrompue (1988, Gallimard), l’auteur rêve et esquisseDSCF3840 le développement d’une Mésoamérique épargnée par l’épopée de Cortes, comme pour se consoler d’une destruction irrévocable mais aussi revendiquer l’intérêt toujours vivace de la pensée indigène.

“Mexico, la ville la plus sûre du monde”

De 1980 à 1990, ce Breton par ses aïeuls et niçois de naissance, «par accident» se rapprochera du monde qu’il regrette et qui lui offre des réponses à ses doutes existentiels. Il pose alors fréquemment ses valises au Michoacan pour de longs séjours. A Tarecuato, il apprend la langue purepecha et traduira des textes indiens qui seront publiés en France (cf: Relation de Michoacan). Invité par l’historien Luis Gonzalez y Gonzalez, le romancier s’inscrit au Colegio de Zamora. «Il avait installé son université dans ce village, conte Le Clézio. Pour Luis Gonzalez, le centre, c’est à dire Mexico, suçait toute l’énergie du pays. En cela la France et le Mexique sont comparables.»

En compagnie de Juan Rulfo et Sor Juana Inés de la Cruz, Luis Gonzalez y Gonzalez fera prochainement l’objet d’un essai écrit par le Prix Nobel 2008. Le Clézio parle de l’historien mexicain comme d’un «maître.» «J’étais totalement un accord avec son idée d’enseigner l’histoire de la cuisine, l’invention des techniques, des évènements qui donnent leur valeur à l’être humain, plutôt qu’une chronologie de victoires et de défaites qui n’ont finalement pas tant d’ importance.»

A Guadalajara -«une ville humaine malgré sa taille»- l’auteur de Diego et Frida s’exprime exclusivement en espagnol. Sa diction pâtit toutefois de son installation à Albuquerque, au Nouveau-Mexique, où il vit avec sa femme et sa fille, Alice, élevée au Michoacan.

Pour qualifier la guerre entre cartels qui ensanglante le Mexique, Le Clézio parle de «dimension tragique.» «La première fois que je suis venu à Mexico, j’avais une impression de totale liberté. On pouvait se balader la nuit, marcher dans tous les quartiers, malgré les avertissements que j’avais reçu. L’Ambassade française m’avait recommandé la prudence, car il y avait un crime chaque nuit à Mexico, moi j’ai répondu qu’avec un crime pour 20 millions d’habitants, le DF était alors la ville la plus sûre du monde (rires). Mais les temps ont changé.»

Un prix Nobel, proche du Mexique, qui n’a rien à dire sur l’affaire Cassez?

Au terme de la conférence de presse, nous nous somme approchés de l’auteur pour lui demander sa position sur l’affaire Florence Cassez. Manifestement contrarié, il nous a répondu n’avoir pas d’opinion. Décoré de l’Ordre mexicain de l’Aguila Azteca par Felipe Calderon au mois de septembre, la plus haute distinction que peut recevoir un étranger, se sentirait-il ambassadeur du pays au point d’esquiver le sujet qui empoisonne les relations franco-mexicaines ? Le Prix Nobel 2008, qualifié de «michoacanisé» par le chef de l’exécutif, préfère se concentrer sur sa «Fondation pour l’interculturalité et la paix» fondée il y a peu.

«Nous préconisons l’enseignement trilingue pour favoriser le dialogue entre les cultures.» Une conviction forgée lors de son enfance sur la très métissée île Maurice, où l’anglais tenait lieu de langue officielle, le français de langue du savoir, et le criollo, dans son cas, de langue maternelle. Pour Le Clézio, la «hiérarchisation culturelle» est l’ennemi à combattre. «Au Mexique, les choses progressent, mais il y a encore beaucoup à faire pour la reconnaissance des autres cultures.» Parole d’un Mexicain pas comme les autres. Voire, d’un Indien…

Thomas Goubin – (legrandjournal.com.mx)

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